Sylvain Cormier
Huit heures d’incroyable proximite au milieu des Beatles, dans leur present, humains tres humains : c’est le fabuleux cadeau que nous fera, fans finis autant que planetaires et public de l’ensemble de ages, le mage-realisateur Peter Jackson. Oui, oh que oui, mission plus qu’accomplie : grace a lui, on regroupe. On entend. On voit. On constate.
Ils font i§a cle, au troisieme segment en serie documentaire The Beatles: Get Back, ou l’on a une fois Afin de toutes la reponse a la question des questions : pourquoi nos Beatles ? C’est un moment qui pourrait se passer a Hambourg en 1960, au Cavern de Liverpool en 1961, au Ed Sullivan Show en 1964, au stade Shea rempli a craquer en 1965, au studio EMI en juin 1967 quand nos Beatles chanterent All You Need Is Love en direct, relayes via satellite au monde entier.
Ca se passe a l’heure du lunch le 30 janvier 1969, dans l’escalier qui mene au toit du 3, Savile Row, la batisse qu’occupe Apple, la compagnie des Beatles, en plein quartier des affaires de Londres. C’est un moment ou les quatre garcons dans le vent ont tout a coup tres peur. Meme Jean McCartney doute. Michael Lindsay-Hogg, le cineaste qui filme les Beatles quasi quotidiennement depuis le debut de janvier, est pret a bien annuler. Flottement. Silence de mort. En outre John Lennon lance l’advienne que saura, l’a Dieu va : « Fuck it — let’s go do it ! »
Et les trois datingmentor.org/fr/sugardaddymeet-review autres le suivent. Comme au temps ou, a chaque echelon vers le succes, Lennon demandait : « il faut ou, compagnons ? » Et les compagnons repondaient, facon mousquetaires ou debarquement de Normandie : « Au sommet ! To the top ! » « Quel sommet, compagnons ? » « To the toppemost of the poppermost ! »
Le grand constat
C’est le grand constat que permet la serie documentaire de Jackson : les Beatles sont bien et i chaque fois les Beatles quand ils sont dans la meme piece, ainsi, John Lennon demeure le fondateur et le meneur du groupe. Meme lorsqu’il n’a d’yeux que pour Yoko Ono, i§a se voit et c’est vraiment excellent a voir : des autres l’admirent, s’esclaffent a chaque jeu de mots tel au premier jour de leur retrouve.
Ca se verifie dans les premieres minutes de la premiere des trois parties, qui se marche dans les studios de cinema froids et caverneux de Twickenham : l’humour a la Lennon reste deja roi. Un disciple de Krishna apparait a l’ecran, immobile. Vraisemblablement invite via George Harrison, se dit-on. « Who’s that little old man ? » requi?te John, citant une scene de la video A Hard Day’s Night, tourne en partie au meme endroit, cinq annees plus tot. Jean McCartney saisit la reference au vol et donne la replique suivante : « He’s very clean ! » Rires de connivence. Meme sensation jouissive quand ils se mettent a parodier leurs « vieux » succes : Help !, Please Please me passent ainsi a la moulinette d’une deconnade en regle. Laisses a eux-memes, les Beatles de 1969 etaient aussi droles qu’a l’ensemble des autres epoques. C’etait leur facon preferee de communiquer.
Jamais n’a-t-on pu a ce point saisir les rapports entre ces quatre jeunes internautes qui n’ont pas encore atteint la trentaine en janvier 1969, mais qui ont vecu ensemble tant d’evenements exceptionnels. Ce paraissent des veterans de combat, des revenants du front que montrent nos images si parfaitement palpables de Peter Jackson (a partir des 60 heures de tournage de Michael Lindsay-Hogg). Aguerris, marques, marrants encore et toujours : des humains avec des cicatrices, qui se connaissent a l’endroit et a l’envers. Qui se paraissent tricotes. Serre.
Une serie documentaire essentielle, non sans raison
Pourquoi constatons-nous ca aussi bien maintenant, aussi qu’on avait deja la soiree Let It be, en 1970, monte et realise avec Lindsay-Hogg a partir des memes sessions filmees ? Parce que c’etait alors impossible. Le miracle d’une serie documentaire de Jackson reste technologique, en plus de beneficier du recul d’un regard neuf. En 80 minutes, la soiree de 1970 reste votre ramassis rapido de votre que Lindsay-Hogg considerait comme pertinent et nullement trop bien croche. Des prises potables des chansons nouvelles, quelque peu de joie rock’n’roll, le meilleur du show impromptu via le toit. Comment pouvait-il faire plus ?
Le realisateur neo-zelandais a eu, lui, le temps et les fonds de prendre l’ensemble des bonnes decisions : l’approche chronologique, votre jour a J’ai fois sur une duree de 21 temps, permet de voir, d’entendre et de comprendre tellement de trucs. On a le temps de voir les chansons naitre, evoluer, puis trouver leur meilleure forme. D’autres paraissent abandonnees en chemin, d’autres bien seront tout juste effleurees. Jackson nous fera vivre, au present, le processus de creation. Comme jamais auparavant. On voit comment chacun contribue, l’ouverture aux suggestions. On voit les Beatles en mode Beatles.
Connaitre mieux chacun des Beatles
Non seulement McCartney deborde-t-il de chansons, mais on le voit presque toujours occupe i jouer. Au piano, d’autres pensees surgissent. Il faudra le voir « inventer » Another Day, The Back Seat of my Car, merveilles en i?tre qui aboutiront sur ses disques en solo. La ti?che de l’equipe de Jackson nous les sort de l’arriere-plan : le procede numerique de « demixage », ameliore expres Afin de la serie, permet d’isoler chaque source (conversations, chant, instrument, trucs ambiants) et de les redistribuer dans l’espace sonore, et cela rend eminemment audible (et rejouissant) cela etait souvent irritant, a J’ai longue, i propos des bootlegs.
On va pouvoir la-dessus se reclamer si Jackson n’a jamais ete trop loin : lorsqu’il a besoin d’une phrase dite avec l’un ou l’autre, il lui arrive de faire le silence autour. C’est commode Afin de l’histoire a raconter, mais moins naturel au regard. Fallait acheter, comprend-on. On y gagne beaucoup plus qu’on y perd, avouons-le.
Ringo parfait, George souriant